Il ne vous reste plus que quelques jours pour courir voir l’exposition Quand les molécules se cuisinent…, présentée jusqu’au 10 juin 2012 au Palais de la découverte. Une belle occasion d’explorer les liens entre gastronomie, science, art… et cocktails !
Qu’est-ce exactement que la cuisine moléculaire, dont on entend beaucoup parler ? « Elle consiste à explorer la cuisine d’un point de vue chimique et scientifique afin de mieux la maîtriser et de créer des saveurs et textures inédites ». Selon son chef de file français Thierry Marx, « elle doit devenir la source d’un univers fantasmé ». C’est ce que Ferran Adrià, Chef du restaurant El Bulli, consacré 5 fois meilleur restaurant du monde avant sa fermeture, appelait la « cuisine techno-émotionnelle » : la technique mise au service de l’émotion. Jusqu’à l’élever parfois au rang d’art : c’est ce que narre la photographe plasticienne Mathilde de l’Ecotais, commissaire de l’exposition, lorsqu’elle ose dématérialiser les aliments dans ses photographies, ou l’enseignant-chercheur en chimie Raphaël Haumont, fréquent collaborateur de Thierry Marx, quand il décortique les aliments cellule par cellule, des mois durant, afin de trouver la recette exceptionnelle.
Fréquemment attaqué sur le côté parfois trop chimique, très technique et peu conventionnel de sa cuisine, Thierry Marx répond qu’il n’y a pas de conflit entre tradition et innovation. Toute cuisine est pour lui moléculaire, puisqu’elle repose sur la chimie – et l’alchimie – des aliments. Du point de vue marketing, la cuisine moléculaire pose pourtant problème : comment donner envie de se rendre au restaurant pour consommer ces plats très techniques ? La cuisine ne peut se contenter d’être une science pour susciter l’intérêt du consommateur.
« Ce n’est pas parce qu’on a faim que l’on rentre dans un restaurant, mais parce qu’on est à la recherche d’une émotion », affirme Thierry Marx. Le même constat peut être fait pour les bars et caves à vin : nous ne pouvons être réceptifs à ces nouvelles sensations que dans un cadre propice, qui permet d’établir une relation affective avec le produit grâce à l’histoire qui est racontée.
C’est ce que démontrent les bars à cocktails qui occupent aujourd’hui le devant de la scène parisienne. Le cadre y est aussi important que le contenu des verres : atmosphère intimiste au minuscule bar L’entrée des artistes, ambiance clandestine à l’Experimental Cocktail Club –qui rappelle les speakeasies de l’ère de la Prohibition–, parfum de secret chez Candelaria, qui se dissimule derrière une taqueria mexicaine… Les bartenders aussi se mettent en scène, théâtralisant leur prestation : l’improbable Italien tatoué qui règne sur le bar de Grazie suffira à vous en convaincre.
D’ailleurs, les techniques moléculaires ont aussi de l’avenir dans le domaine des spiritueux : il est désormais possible d’exalter des arômes grâce au procédé de cryo-concentration (concentration par le froid), ou de créer des textures inédites : Raphaël Haumont imagine un Kir moléculaire qui associerait à un grand champagne des billes de cassis encapsulées dans des pellicules extra-fines.
A l’instar de ce qu’Auguste Escoffier prédisait dès 1907 pour la cuisine, on peut donc affirmer que la préparation des cocktails et spiritueux, « sans cesser d’être un art, deviendra scientifique » !
Quand les molécules se cuisinent : démonstration pour le grand public jusqu’au 10 juin 2012 au Palais de la Découverte, avenue Franklin Roosevelt Paris 8.
Marie C. et Hortense
Photos Mathilde de l'Ecotais, DR.
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