La chaîne de grands magasins britannique Woolworths vient de lancer un champagne à 5£, soit moins de 8€ la bouteille de 75cl. Au-delà des problématiques de l'image et de la qualité, j'ai beau retourner la question dans tous les sens -et je ne suis pas la seule-, je n'arrive pas à comprendre comment un champagne peut raisonnablement être positionné à ce prix grand public : avec le kilo de raisin fixé entre 4 et 5 euros chaque année -et il faut 1,2kg de raisin pour une bouteille de champagne-, et la taxe gouvernementale britannique fixée à 2,50€ environ, on atteint déjà 80% de ce prix de vente, sans compter les autres frais -d'élaboration, de transport, de promotion ainsi que la TVA... et les marges.
Le champagne Woolworths est proposé dans la gamme Worthit!, des produits à prix "imbattables" (mais qui le valent bien) -une volonté de répondre à la demande des consommateurs pour des "produits de luxe bon marché" (!) selon les porte-paroles de la marque.
Certes, le prix du champagne a augmenté ces dernières années, lié à la hausse significative de la consommation dans le monde alors que l'appellation n'est pas extensible et que la production atteint ses limites. On peut donc comprendre que par réaction, certains distributeurs cherchent à proposer à leurs clients des produits plus accessibles... la limite de l'exercice étant comme ici lorsque le calcul paraît totalement inconcevable, sauf à vendre à perte.
Dans le cas du champagne Worthit!, la force de la proposition repose à mon sens avant tout sur le buzz créé par Woolworths et engendré par cette annonce : au-delà de l'ultra attractivité du prix, la chaîne de magasins a, dès le lancement, annoncé qu'en prévision du succès pressenti pour le produit, les ventes seraient limitées à une bouteille par client. Ou comment adopter une stratégie de marketing du manque pour créer un succès commercial et faire parler de sa marque. Ce lancement est aussi pour Woolworths l'occasion de revenir sur le segment des alcools -WW est surtout présent, pour la partie "alimentaire", sur le segment des sucreries, d'où sa volonté de communiquer sur les associations gustatives du produit... qui, si l'on en croit l'argumentaire, se marie idéalement avec ... des sucreries !
Résultat : je n'ai pas eu d'info sur le niveau d'engouement pour ce champagne depuis son lancement, je ne sais pas non plus quelles ont été les réactions en Champagne vis-à-vis du producteur (qui à mon avis ne s'est pas fait que des copains) mais Woolworths a au moins réussi à faire parler de sa marque et à renforcer son image de grand magasin bon marché désireux de rendre accessible au plus grand nombre ce type de produit. Dommage que ce soit au détriment de l'image du champagne.
Au vu du coût de la bouteille il nous est permis d'émettre des doutes sur les qualités organoleptiques du dit produit. Il est effectivement alors à redouter le souvenir qu'il laissera aux clients : pas de recherche de fidélisation de marque via un ré-achat ?
J'ai, en outre, du mal à saisir le concept "produits bon marché de luxe" cela me semble antinomique.
Bref cela va faire grincer les dents en Champagne ;)
Rédigé par : Alexandra B | 09 octobre 2007 à 18:27